mercredi 12 décembre 2012

To "bake" a Visa


Lorsque vous dites à un citoyen français que vous voulez partir vivre et travailler aux États-Unis, sa première réaction est de l’ordre du« quoiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ???? » « Tu n’as pas vu le denier film de Michael Moore ???? » ou « Tu sais qu’ils n’ont toujours pas aboli la peine de mort !!!! »… Bref, un citoyen français pensera à tous les inconvénients de la vie aux États-Unis sauf… aux démarches qui permettent effectivement d’endurer les terribles souffrances de l’American dream.

Pour vivre aux États-Unis, il faut déjà pouvoir y aller. Et ce n’est pas une mince affaire !

Monsieur François Hollande aura beau rappeler dans ses discours « Nous ne sommes pas n’importe quel pays, nous sommes la France », les immigrants gallois sont traités exactement de la même façon que les autres.

Constituer un dossier d’immigration

La première chose à faire pour immigrer, c’est de trouver un mari américain… ce n’est pas toujours simple. Les maris (ou futur maris) américains ne savent pas utiliser une fourchette correctement, ils pensent que le pain blanc (c’est-à-dire tous les pains français) est mauvais pour la santé, ils ne comprennent pas que l’on puisse parler de politique sans se fâcher et ils considèrent Michael Jackson comme le meilleur artiste de tous les temps. Mais une fois que vous avez compris que votre petit-ami américain n’est pas français, tout est plus acceptable.

Une fois que vous avez l’américain et que vous avez renoncé à lui faire apprécier le vin rouge, le café et les discussions interminables entre amis, vous pouvez décider de demander au FBI l’autorisation de vous marier. Le FBI c’est un peu comme une belle-mère : il veut tout savoir sur tout, vous trouve suspect par principe et se braque sur des détails. Le FBI est aussi très exigeant, il veut la preuve que vous avez effectivement une relation avec votre américain :

1. Il vous faudra alors réunir les photos que vous avez prises depuis le début de votre relation (bon ça c’est facile !)

2. Imprimez des mails que vous avez envoyés ou qu’on vous a envoyés et dans lesquels il est fait explicitement référence à votre relation. Ça n’a pas l’air comme ça mais ce n’est pas si simple. Entre ceux que vous avez effacés, ceux qui parlent de votre dernière dispute (on est toujours plus volubile quand les choses ne tournent pas rond) et ceux dans lesquels, après vous être longuement épanché sur l’amour que vous vous vouez l’un pour l’autre, votre fiancé décrit avec naïveté et enthousiasme l’impressionnante culture de plante de cannabis que son meilleur ami cache dans le sous-sol… et bien il ne reste pas grand-chose !

3. Joingnez au dossier les contrats des appartements que vous avez loués (… euh ils sont où déjà ? Ah oui ! On n’en avait pas, en Italie tout se fait au black !), les contrats de travail des entreprises dans lesquelles vous avez travaillé ensemble (et là catastrophe ! Le contrat ayant été signé un mois après un déménagement, nous avons Mike qui déclare vivre au centre de Turin et moi dans un autre quartier…), les billets d’avion que vous avez acheté pour vos dernières vacances en amoureux (qu’on a bien évidemment jeté).

4. Demandez à vos amis et à votre famille d’écrire des rédactions, en anglais si possible pour éviter d’avoir à les traduire, dans lesquelles ils doivent expliquer ce qu’ils savent de votre relation et jurer dire toute la vérité, rien que la vérité sous peine de terribles punitions.

Vous y ajoutez quelques formulaires incompréhensibles et un chèque de 340 $. Traduisez le tout à l’anglais et vous obtenez un dossier complet !

La réponse arrive trois mois plus tard…

La deuxième étape

Une fois que votre belle-mère, euh pardon ! Le FBI a « approuvé » votre dossier, il le transmet à l’ambassade américaine du coin… donc à Frankfurt pour moi. Et là… la folie commence !

Vous êtes dirigé vers un site Internet dans lequel on vous « explique » ce que vous devez faire. Je ne sais pas qui a écrit le site de Frankfurt mais apparemment c’est quelqu’un qui n’a jamais dû constituer un dossier d’immigration… ni d’ailleurs un dossier tout court ! Bref, c’est incompréhensible ! Divisé en trois étapes, ils vous disent que vous devez envoyer les papiers de la première étape mais ce sont les mêmes papiers que dans la troisième étape, mais les papiers de la troisième étape ne doivent pas être envoyés avant ladite première étape, et si par malheur vous sautez la deuxième étape avant d’envoyer les papiers de la première étape qui sont aussi ceux de la troisième étape, et bien votre dossier souffrira de terribles retards ! Même notre avocat en a perdu son anglais !

Pour éviter tout problème nous avons décidé d’envoyer la première et la troisième étape en même temps…

Pour se faire vous devez

1. remplir des formulaires abracadabrantesques : liste de tous vos employeurs depuis cinq ans… (cool je suis free-lance donc j’ai environ 50 000 employeurs….),liste de toutes les écoles, universités, formations etc. dans lesquelles vous avez étudié avec les adresses et les numéros de téléphone ; adresse à laquelle vous allez vivre aux USA… (et comme vous n’y vivez pas encore… comment que vous la connaissez cette adresse ?)… Noms et prénoms de vos parents…(ça aurait dû être simple mais voilà ma mère est connue sous différents prénoms : Maria-Adoración (avec accent sur le o) pour Francisco Franco en Espagne, Marie pour l’administration française, Dori pour les intimes (français), Dorita pour la famille (espagnole), Doritaaaaaaaaaaaaa chez ma grand-mère et Marie Adoracion (sans accent sur le o) dans mon extrait d’acte de naissance que je dois envoyer avec le formulaire… bref, comment vais-je faire pour expliquer au FBI que je ne sais pas comment s’appelle ma mère ?... Ah et j’oubliais : liste de toutes les associations, organisations, syndicats et partis politiques auxquels vous avez appartenu… Aïe ! Le coup du« Mouvement des jeunesses socialistes » ça ne va peut-être pas le faire chez l’oncle Sam… Ensuite ils vous posent ces terribles questions du genre : avez-vous participé à un génocide ? Souhaitez-vous entrer sur le territoire américain pour faire exploser une bombe terroriste ? Êtes-vous un dealer de drogues ? Entendez-vous entrer aux USA pour commettre des crimes ? Vos parents sont-ils des membres d’une organisation de trafic d’êtres humains ? Etc. Etc.

2. trouver un « affidavit of support », c’est-à-dire quelqu’un qui signe un papier comme quoi si vous devenez une charge publique, il paiera pour vous. Arrêtons-nous deux minutes là-dessus : qu’est-ce qu’une charge publique ? En France on le traduirait par RSA (ancien RMI), APL, Carte de transport gratuite ou presque, CMU et tout le tralala. Ah oui mais… aux USA, ça n’existe pas ! Et non, le FBI a juste peur que vous deveniez pauvre et que vous demandiez au gouvernement des « coupons »… qu’est-ce ? Les« coupons » (prononcez le ssss final) sont des coupons (en français) qui vous permettent d’acheter de la bouffe dégeuelasse dans des supermarchés type LIDL ou Leader Price mais en pire… donc question à la con : pourquoi une française, c’est-à-dire, quelqu’un qui appartient à un des pays les plus socialiste au monde, voudrait entrer aux USA rien que pour obtenir ces fameux« coupons » (prononcez le ssss) ? Demandez au FBI…

3. Joindre votre extrait de casier judiciaire et votre acte de naissance (jusque-là, ça va) et tous les casiers judiciaires de tous les pays dans lesquels vous avez vécu plus de 6 mois depuis l’âge de 16 ans…aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhh !!!!!! Ça m’en fait 4 : France, Espagne, Italie et Allemagne. Voici un extrait de ce qui m’est arrivé avec un seul de ces papiers (une fois que vous avez fini de lire, multipliez par 4 et vous obtenez ce par quoi je suis passée) :


Obtenir votre casier judiciaire quand vous avez vécu dans quatre pays… c’est facile :
Le cas de l’Espagne : il suffit d’envoyer un formulaire dûment rempli, la photocopie certifiée conforme de votre carte d’identité et le reçu de la banque prouvant que vous avez payé les 3 euros 58 de taxes (soit dit en passant, il s’agit d’un transfère international donc le transfère coûte plus cher que la taxe).
jour 1
: direction le cyber café pour imprimer le formulaire : « Guten tag ! » « Guten Tag » « 1 Computer Bitte » « %$# @#$% !!! #@$@# ALLES CAPUT ». Retour à la maison sans formulaire.
jour 2 : direction la poste pour faire certifier conforme ma carte identité : « Guten tag », « Guten tag », je montre la photocopie de ma carte d’identité et ma carte d’identité en faisant le geste du tamponnage pour certifier conforme. « ici ce n’est pas possible, vous devez aller à la police ». Je vais donc au commissariat. Je m’assois à côté d’un SDF bourré et j’attends gentiment mon tour en me bouchant le nez. Mon tour arrive : « Guten tag ! », « Guten tag » je montre la photocopie de ma carte d’identité et ma carte d’identité en faisant le geste du tamponnage pour certifier conforme. « Ici nous n’avons pas de tampon, vous devez aller à la mairie mais il est 16h.. et elle est fermée… ». Retour à la maison sans certification.
jour 3 : direction la mairie : « Guten tag » « … », je montre la photocopie de ma carte d’identité et ma carte d’identité en faisant le geste du tamponnage pour certifier conforme… Le type : « #@$!% %$#@!% %%%%% !!!! », Moi « I don’t get it ! », le type en colère fait des gestes agressifs et hurle : « @$# !^%#@ ^$# !@$%^T ^$#E@ ». Je finis par comprendre qu’il faut aller dans une autre salle. J’y vais. J’attends. Je « parle » avec une dame qui refuse de me parler anglais mais qui me fait comprendre qu’elle ne certifie pas conforme les cartes d’identités françaises… et oui j’avais qu’à être allemande ! Retour à la maison sans certification.
jour 4 : j’envoie ma lettre au tribunal de Madrid avec un formulaire dûment rempli, le reçu de la banque et la photocopie de ma carte d’identité… sans certification.
jour 58 : je reçois un mail de l’Espagne : « nous avons reçu votre lettre mais vous devez nous envoyer la photocopie certifiée conforme de votre carte d’identité »
Vive l’Europe !


4. Le tout doit être en anglais ou en Allemand… je traduis donc en anglais (bien 10 heures de travail en tout) et je demande à des collègues de signer les traductions (ouf ! nous travaillons dans des écoles de langues).

5. Des preuves « d’engagement », c’est-à-dire de fiançailles… très bien puisque nous n’avons fait ni fête, ni demande officielle, ni projet concret de mariage et que je n’ai même pas de vrai bague !!!!

6. Payez 192 (pourquoi ? Parce que !), joignez une lettre prépayée et envoyez le tout originaux et photocopies.

Et voilà tout a été envoyé et deux semaines plus tard… talala… il manque un formulaire, les traductions doivent être certifiées conformes par un traducteur certifié conforme de leur liste à eux (ça va me coûter cher !) et il fallait faire la visite médicale (étape number 2 qu’on avait sautée parce qu’on pensait bien faire) :

La visite chez le « matasanos »

Ce que beaucoup de gens ne savent pas (dont moi avant) c’est que nous avons beau appartenir à un pays qui jouit du meilleur système de santé au monde, nous devons quand même passer une visite médicale (checking complet) avant de nous rendre dans le pays numéro 47 dans le classement mondial des systèmes de santé…

Me voilà donc à la recherche d’un médecin reconnu et certifié par l’ambassade… oui parce qu’on ne peut pas aller n’importe où ! Évidemment, il n’y a pas de médecin certifié à Cologne… pourquoi faire ?... je dois donc aller à Dortmund (1h30 de train). J’appelle donc pour prendre rendez-vous. La secrétaire :« Oui oui très bien… venez mercredi 7 novembre à… 7h30 », Moi :« du matin ???? », la secrétaire « bien sûr ! »,moi : « oui mais j’habite à Cologne ! », la secrétaire (qui va donner la réponse qui tue à laquelle on ne peut jamais rien répondre :« Oui mais c’est comme ça ! ». L’autre option aurait été de prendre rendez-vous à Berlin (6 ou 7h de train).

Me voilà donc debout à 4h00 du mat pour prendre le train à 5h et quelques au matin du 7 novembre.

Arrivée à 6h50 à Dortmund, je me rends d’abord au cabinet de radiologie pour le test de la Tuberculose. Quelques heures plus tard j’en ressors avec une radio de mes jolis poumons… je n’ai pas la tuberculose…ouf ! Je respire (et bien apparemment vu la jolie couleur blanche de mes petits poumons) !

Je prends le métro et quelques minutes plus tard j’arrive chez le médecin. La secrétaire note mes informations : La secrétaire : « vous êtes née dans quelle région en France ? », moi : « En France on ne né pas dans une région, seulement dans une ville », la secrétaire courroucée : « Et bien à moi il me faut une région !!! »,moi, levant les yeux au ciel : « Bon ben vous avez qu’à écrire Pyrénées-Atlantiques… » (Désolée mais Aquitaine ça faisait encore plus con !).

Après ça, j’ai été pesée, mesurée, tensionnée (= ils ont pris ma tension… un peu basse d’ailleurs). Prise de sang, d’urine et test visuel… avec les lentilles de contact donc résultat : 10/10 ! :o)

Le médecin, amoureux de la France parle français ! Ouf on est sauvé !

Tout va bien sauf qu’il me manque un vaccin… rien de grave je peux le faire à Cologne et lui faxer le tout. (48 euros de vaccin plus 46 euros 91 centimes de consultation plus tard, tout est en règle !)

La visite médicale… ce n’était finalement pas grand-chose… enfin presque ! M’étant levée très tôt au matin de ce fameux 7 novembre mes rythmes du sommeil s’en trouvèrent bien perturbés. Résultat : je tombe malade le lendemain matin ; nausée, migraine et fatigue intense… mais je suis rassurée… ce n’est pas la tuberculose !

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